Ordre Martiniste
Deuxième Degré
- Mystique
1913
Ouverture
Le PHILOSOPHE INCONNU : Frère
Inconnu, sommes-nous dûment protégés contre la curiosité des profanes ?
Le FRÈRE INCONNU frappe un coup :
Frère Expert, veuillez faire évacuer les approches
de la Chambre Mystique et faire savoir au Garde que cette Loge va être ouverte
au Second Degré. Recueillez le mot de passe des Frères.
l’EXPERT frappe cinq coups.
Les Introducteurs s’approchent de sa place et poursuivent leur route par
le Laboratoire, pour remplir leur devoir.
l’EXPERT : Frère
Inconnu, vos ordres ont été exécutés; les abords de la Chambre Mystique sont
déserts, l’écho demeure silencieux, le Garde est à son poste, et les
Frères ont le Mot de passe.
Le FRÈRE
INCONNU :
Donnez-moi le Mot de passe.
l’Ordre est exécuté.
Le FRÈRE INCONNU : Très
Sage, nous sommes dûment protégés.
Le PHILOSOPHE INCONNU : Frère
Inconnu, êtes-vous un Initié ?
Le FRÈRE INCONNU : J’ai
vu le Pentalphe et j’en connais la signification.
Le PHILOSOPHE
INCONNU :
Comment avez-vous acquis cette connaissance ?
Le FRÈRE INCONNU : Par
la méditation.
Le PHILOSOPHE INCONNU : Quels
sont les sujets de vos méditations ?
Le FRÈRE INCONNU : Les
Symboles, les Lettres, les Nombres et les Figures géométriques appelées
Pentacles.
Le PHILOSOPHE INCONNU : Qu’enseignent-ils
?
Le FRÈRE INCONNU : Le
chemin parfait vers la régénération de l’Homme.
Le PHILOSOPHE INCONNU : Quand l’Homme sera-t-il régénéré
?
Le FRÈRE INCONNU : Lorsque,
par la méditation, il aura acquis la connaissance de la nature des contrastes
et la compréhension de la divine Loi de l’Harmonie universelle, anciennement
symbolisée par la Lyre d’Orphée.
Le PHILOSOPHE
INCONNU, trois coups : Mes
Frères, cherchons, avec notre corps et notre pensée,
avec notre âme et notre esprit, cette divine Vérité par laquelle
s’accomplira la réintégration de l’Être humain dans ses droits et ses
avantages primitifs... Ensemble, mes Frères,
par le Signe ..., par la Batterie ... Je déclare la Loge n°... ouverte pour les travaux de la Chambre Mystique... Frère
2e Maître des Cérémonies, veuillez vous
assurer si un Associé Martiniste n’attend pas pour recevoir
de nouvelles lumières sur nos Mystères.
l’ordre est exécuté.
Le 2e MAÎTRE DES CÉRÉMONIES :
Un Frère Inconnu, Associé qui désire être examiné au
sujet de ses progrès dans le Premier Degré du Martinisme,
attend dans le Pronaos du
Temple.
Le PHILOSOPHE INCONNU : Introduisez
le Frère Inconnu.
l’ordre est exécuté et l’on conduit le Candidat en face du trône,
devant l’autel convenablement éclairé.
Examen du Candidate
l’examen
du Candidat est dirigé par l’Orateur, l’Expert et le 1er Introducteur et ne doit pas durer plus de vingt minutes. Les questions
sont laissées à la discrétion des Examinateurs ; ceux-ci, cependant, doivent observer l’ordre suivant
:
1°
Dites vos impressions sur la première partie de votre initiation, La
Création
de l’Homme d’après
la Genèse, sa
situation dans le jardin de l’Eden, sa chute, et la possibilité de sa réintégration.
2°
Quelles idées pratiques ou philosophiques le Symbole du Masque a-t-il évoquées
à votre esprit ?
3° Quelles idées morales déduisez-vousg de la
contemplation des trois Lumières.
Après examen, le Philosophe
Inconnu fait quelques remarques au Néophyte relativement à ses impressions
(question n° 1), l’encourage à
méditer de plus en plus de façon à acquérir tout l’ensemble de la science
ésotérique de cet important rite de l’Ordre. Très peu de paroles sont dates
en réponse à la question
2,
mais la question 3
doit être très développée.
Le PHILOSOPHE INCONNU : Si
tu comprends bien l’importance des enseignements qui t’ont été donnés,
l’initiation au Premier Degré de l’Ordre martiniste a fait de toi un homme
nouveau.
Devenu un Philosophe de l’Unité, tu peux, ainsi que
les anciens Initiés, entrer en communion spirituelle avec les prêtres de tous
les Cultes, avec les disciples de toutes les Écoles de Philosophie; à jamais,
tu auras présent devant les yeux le fécond Symbole des Luminaires, enseignant
comment la Diversité revient sans cesse vers l’Unité, loi que les Egyptiens
symbolisaient par la pyramide qui, bien que triangulaire à la base, se termine
cependant au sommet par un point unique, figurant l’Unité de la Vérité ou
de l’Absolu.
La pyramide présente ceci de particulier que chaque
face peut être prise pour base, le sommet correspondant étant infailliblement
un point. Ceci nous enseigne qu’aucune nation, aucun peuple, aucune catégorie
d’individus, aucune personne ne peut réclamer pour soi le monopole exclusif
de la Vérité de Dieu; mais que celle-ci est, au contraire, accessible à tout individu, à toute
communauté, à tout peuple, à toute nation
dont les aspirations sont élevées.
Au Congrès des Religions, en
1893, le Professeur J. Estin Carpenter, d’Oxford, disait : « Celui-ci
est ne Païen; cet autre, Juif; ce troisième, Musulman. Le Philosophe voit en
chacun un être qui cherche Dieu. »
Cela est une pure doctrine martiniste.
De même que toutes les formes du Culte divin se réunissent
dans l’Unité d’une Religion Universelle et que tous les systèmes de
Philosophie
s’harmonisent dans l’Unité de la Science, de même tous les Hommes et
toutes les Femmes forment l’Unité de l’Humanité.
De même que la Cellule, principe anatomique du Corps,
forme les organes (muscles, glandes, sang, veines...), de même les organes
forment les appareils (cerveau, coeur), et l’assemblage des appareils nécessaires
forme l’Individu.
C’est ainsi que l’Individu, cellule du grand Corps
de l’Humanité, forme la Famille, organe de l’Humanité. Plusieurs familles
forment une Tribu et plusieurs Tribus forment une Colonie, qui est un individu
plus considérable. Enfin les Colonies forment les Nations, les Nations
composent les Races, et toutes les Races se combinent dans l’organisation
sublime de l’Individu le plus considérable : le Genre Humain.
Cellule
|
Individu
|
Colonie
|
Organe
|
Famille
|
Nation
|
Appareil
|
Tribu
|
Race
|
Individu
|
Colonie
|
Genre humain
|
C’est pour cette raison que les Nations et même les Tribus diffèrent par leurs aptitudes, leurs langages, leurs usages, comme cela a lieu
chez les individus. l’Humanité elle-même est un Individu, un être réel,
ayant sa conscience propre, ses lois particulières de vitalité et de
transformation —
non de mort, car l’Humanité est éternelle, —
et ces lois réagissent sur chacun de nous autres,
hommes, qui composons le grand Corps, de la même façon que chacune de nos
cellules anatomiques réagit sur notre organisme entier,
Ceci te donne la cler de la nécessité sociale
qu’il y a pour nous d’avoir de la solidarité et de détruire les monstrueux
préjugés contre les Sexes, les Religions et les Races; et te démontre
clairement combien il est rationnel de sacrifier sa personnalité pour le plus
grand bien de la collectivité, ainsi que l’enseigne le Symbole impressionnant
du Masque.
Dans le système religieux des Parsis, on voit que
chaque disciple de Zoroastre, avant de prier pour lui-même, prie pour son
souverain et sa Communauté sa Religion lui prescrit de noyer son Individualité
dans l’intérêt de sa Communauté. Il doit se considérer
comme une partie et une parcelle de la Communauté entière. Le bien de tous
sera le Bien — et le bien
solide — de chacune des parties.
Cette sublime philosophie, qui fut celle de tous les
Initiés des Centres Orientaux et Occidentaux de l’Illuminisme, est aussi
vieille que le monde est vieux, et, si
l’on en croit la Tradition, ce fut le premier Commandement de Dieu aux Anges
du septième Ciel.
l’Humanité, formée ainsi de tous les hommes et toutes femmes qui la constituérent, fut appelée par les
Anciens Adam-Eve. Adam signifiait l’ « ensemble des hommes » ; Eve,
l’ « ensemble des femmes ». l’Histoire
d’Adam et d’Eve n’est pas autre chose que l’Histoire du Genre humain,
laquelle a été indignement travestie par les théologiens.
Cette connaissance de la Personnalité de l’Être
Humain nous donne la raison d’être de la Fraternité, en montrant que la réhabilitation Individuelle ne saurait exister sans
être accompagnée de la réhabilitation de la Collectivité.
Applique ces connaissances aussi bien à tes études
sociales qu’à tes études religieuses.
Philosophe de l’Unité, médite de tout ton coeur
sur les conséquences des quelques idées qui viennent de t’être exposées et
qui ressortent clairement du Symbole des Luminaires et de celui du Masque. La
chute de l’Homme t’apparaîtra alors comme une triste réalité, et,
dans la réintégration dans ses droits et prérogatives
primitifs, tu verras le véritable but des aspirations de
tout Initié. La réhabilitation de la Collectivité par le désintéressement,
et, s’il le faut, par le sacrifice de l’Individualité
intellectuelle, telle est la base des mystérieux enseignements du Martinisme.
Maintenant que tu es pleinement renseigné sur les
vues de notre Ordre bien-aimé, veux-tu, mon Frère,
contracter le solennel engagement de devenir « Un » avec nous, de sorte
que nous puissions devenir « Tous » avec toi ?
Le CANDIDAT : Je
le veux.
Le PHILOSOPHE INCONNU frappe trois coups; tout le monde se lève : Répète après moi :
Obligation
« Devant le Divin Créateur et devant cette
respectable Loge d’Initiés, je promets solennellement et jure de consacrer ma
vie entière, mes forces, mon influence et mes moyens à la réhabilitation du
Genre Humain dans ses privilèges les plus sacrés Liberté intellectuelle,
morale et physique, sans préjugés contre les sexes, les situations sociales.
les croyances, les opinions politiques ou la couleur. En outre, de m’unir de
corps et d’esprit avec les membres de l’Ordre martiniste, où qu’ils
soient assemblés, pour le bien du Genre Humain. Depuis je promets
solennellement et jure de porter assistance sans réserve à tous les honorables
membres malheureux de l’Ordre que je pourrai rencontrer, quels que soient
leurs torts. Tout cela, je le promets et jure solennellement et sincèrement avec la ferme résolution de l’exécuter, ne m’exposant à rien moins qu’à
être honteusement expulsé de l’Ordre. Ainsi que Dieu me soit en aide. »
TOUS : ...
Le PHILOSOPHE INCONNU frappe un coup. Tous s’assoient : En conséquence, je déclare ce Frère Inconnu digne d’être admis dans
notre Temple. Frère Introducteur, reconduisez le Néophyte au
Laboratoire, préparez-le et attendez mes ordres.
Le
Néophyte et son conducteur se retirent.
Préparation du
Candidat : Le Candidat est dépouillé de tous les métaux qu’il porte — or et argent; le
pied gauche nu, le pied droit chaussé ; le bras droir est nu. On lui met un épée
dans la main gauche, une branche de myrte dans la main droite. Ses yeux sont
alors bandés et on le conduit à la porte de la Loge ; le premier Introducteur frappe deux coups.
La porte s’ouvre.
Le MARÉCHAL
: Qui
vient ici ?
Le PREMIER INTRODUCTEUR : Un Frère
Inconnu qui se dirige vers le Temple.
Le MARÉCHAL
au Candidat : Frère Inconnu, êtes-vous Martiniste ?
Le NÉOPHYTE : Je
suis Philosophe de l’Unité.
Le MARÉCHAL
: Passez.
Le Candidat entre dans la Chambre et suit le chemin indiqué par la ligne
ponctuée, c’est-à-dire qu’i va vers l’angle Sud-Est de la Loge, pénétré
dans la Cour dont la porte est restée ouverte, puis dans le Laboratoire, La
Chambre de la Loge et s’arrête à l’Occident vis-à-vis du Frère Inconnu,
qui dit : Qui vient ici ?
Le PREMIER INTRODUCTEUR : Un
Frère Inconnu qui se dirige vers le Temple.
Le FRÈRE INCONNU : Frère
Inconnu, êtes-vous Martiniste ?
Le NÉOPHYTE : Je
suis Philosophe de l’Unité.
Le FRÈRE INCONNU : Passez.
La même trajet est répété autour de la Cour du Laboratoire et de la
Loge. On enjoint au Candidat de faire face à l’Orient devant les colonnes. l’expert se tient debout, sur la droite, à l’entrée du Temple.
Le PREMIER INTRODUCTEUR : Frère Expert, ce Frère
Inconnu a été jugé digne d’obtenir son admission dans le Temple
et de recevoir les bienfaits des lumières. Il est dûment préparé, représentant
un vrai fils de la Nature. Son pied gauche est nu, pour figurer l’eau; son
pied droit est chaussé, pour représenter la terre; son bras droit est nu, et sa main droite tient une petite branche de myrte, pour
symboliser le fait que la vie et la mort se suivent sans discontinuité, de même
que la luxuriante végétation de l’été succède à la froide désolation de
l’hiver; son bras gauche est couvert, et sa main
gauche tient une épée pour signifier que la mort n’est que la suite de la
vie. Il a les yeux bandés, pour représenter la loi aveugle et fatale qui préside
à la génération et la régénération éternelles.
l’EXPERT : Mon
Frère, vous êtes arrivé devant le portique du Temple. Frère Introducteur,
enlevez le bandeau qui couvre les yeux de
notre Frère et gardez ses insignes.
Le Néophyte
tend sa petite
branche de myrte au Premier
Introducteur et son épée au Second Introducteur.
l’EXPERT, s’adressant au Néophyte : On lit, dans les Écritures, que
Salomon, à l’imitation des Hindous et des Egyptiens, plaça devant l’entrée du Temple, à
Jérusalem, deux colonnes d’airain : l’une était appelée Jakin,
l’autre Bohaz, ce qui signifie la Force et la Faiblesse en opposition. Ces
deux colonnes représentaient l’Homme et la Femme, la Raison et la Foi, l’Autorité
et la Liberté, le Droit et le Devoir, Cain et Abel. Elles étaient les colonnes
du monde intellectuel et moral. C’était
le Symbole monumental de l’antonymie nécessaire à la grande loi de la Création.
En fait, toute force demande une Résistance; toute Lumière, une Ombre ; toute
Convexité, une Concavité, tout Vide,
un Réceptacle; tout Règne, un Royaume; tout Souverain, un Peuple; tout
Travailleur, des matières brutes; tout Conquérant, un sujet de Conquête; l’Affirmation
s’étabut d’elle-même par la Négation; le Fort ne triomphe jamais que par
comparaison avec le Faible; l’Aristocratie ne se manifeste jamais qu’en s’élevant
au-dessus du Proletariat. Les colonnes, de couleur différente, mais de même
substance, opposées l’une à l’autre, s’harmonisent cependant dans l’Unité d’un terme intermédiaire l’Arche
qu’elles supportent. Entre deux termes opposées existe toujours un terme résultant,
ésotérique et conciliant, qui neutralise les deux premiers en un seul
principe identique la Loi de l’équilibre. Ainsi, de l’union des termes
opposés s’élève un troisième principe, découlant des deux autres et réunissant
les deux termes opposés dans une neutralité commune. Le nombre 3 est, par
excellence, le Symbole du Principe neutre de la Nature, du Conciliateur des
oppositions violentes que nous voyons autour de nous. l’initiation seule
permet de découvrir les Lois de l’Équilibre, de ce Terme Commun qui réunit
toutes les oppositions. Le Bien et le Mal, la Vie et la Mort, la Lumière et
l’Obscurité, l’Esprit et la Matière, la Chaleur et le Froid, l’Harmonie et la
Discorde, l’Initiative et la Résistance, le Fixe et le
Volatil, l’Essence et la Substance, telles sont les Colonnes, et le véritable
Initié verra dans l’Arche le troisième Terme qui donne la raison d’être
de ces oppositions apparentes, lorsqu’il se rappellera que l’Harmonie résulte
de l’analogie des Contraires, sublime axiome de nos anciens Maîtres. Il
n’existe point dans la Nature de contrastes qui ne contribuent à cette belle
Harmonie, si poétiquement symbolisée chez les Grecs par la Lyre d’Orphé,
dont les bras, représentant les deux colonnes, reposent en parfait équilibre
sur la base si gracieuse de l’instrument,.. Entrons,
l’Expert
frappe deux coups on
deux fois ses mains l’une contre l’autre. Le rideau s’ouvre en partie. Le Candidat se dirige lentement vers le pied de la Croix. Les Frères
méditent (Musique
douce). Après quelques
minutes de silence, le Philosophe
Inconnu descend de son Trône et marche vers le pied de la Croix. l’Orateur, tenant à la main un miroir, se place à la droite du Candidat.
Le PHILOSOPHE
INCONNU s’adressant au Néophyte : Qui
es-tu, mon Frère, et que veux-tu ?
Le NÉOPHYTE : Je
suis un Philosophe de l’Unité, et je désire recevoir de nouvelles lumières.
Le PHILOSOPHE
INCONNU : l’Unité, mon Frère, ne peut rien
produire que par opposition à elle-même...
l’Orateur présente le miroir au Néophyte, qui demeure masqué.
Ceci donne naissance à la dualité, ou Principe
binaire de l’opposition des contraires, représentée symboliquement par le
nombre 2,
qui est par excellence le Principe passif; ou aux deux
colonnes entre lesquelles tu as dû passer avant d’être admis à pénétrer
dans la Chambre Mystique. Les deux colonnes, qui expliquent le mystère de
toutes les oppositions dans la Nature, sont les deux clefs qui ouvrent les
portes des Cieux. Astronomiquement, elles représentent les Équinoxes d’Été
et d’Hiver. Toutes les Initiations montrent au Néophyte le Symbolisme du
Binaire ou de l’Opposition des Contraires, dès son entrée dans le Temple ;
et la recherche de la Vérité, de cette Vérité dont la lumière est l’objet
de ton désir ardent, n’est autre chose que le désir de l’âme humaine de découvrir
le Troisième Terme, l’Élément d’Équilibre, le Réconciliateur des
ennemis jumeaux. Si importante est la reconnaissance du troisième principe
quelle a donné naissance au dogme de la Trinité, qu’on retrouve à la base
de tous les systèmes de Théogonie. Chez les Egytiens, le Terme d’Équilibre
entre l’Osiris masculin et l’Isis féminine est l’enfant Horus, Osiris
lui-même synthétise Amon, Principe Actif déifié de l’Univers, et Ptah,
Principe Passif déifié de l’Univers. Dans la Théogonie hindoue, Shiva, le
Transformateur, réunit les pouvoirs de Brahma, le Créateur, et de Vishnou, le
Conservateur. Dans la Théogonie des Kabbalistes, Kether, le Pouvoir équilibrant
absolu, combine Chocmah, La Sagesse absolue, et Binah, l’Intelligence
absolue. Dans la Théogonie chrétienne, le Médiateur entre le Père ou
Principe Actif et le Fils ou Principe Conservateur est le Saint-Esprit, ou la
Force Universelle qui anime. C’est ce Binaire, destructeur momentané de l’Équilibre,
qui montre les lois, si peu connues, de cette Force Universelle répandue
partout et partout invisible dans son essence, Force terrible et toute-puissante
entre les mains de l’Initié... Mais il suffit d’en connaître
l’existence, mon Frère... Les deux Colonnes sont représentées hiéroglyphiquement
par le caractère Hébreu ך
(daleth), dont la signification kabbalistique est Force, Pouvoir,
Immutabilité. C’est la quatrième lettre de l’Alphabet Sacré, et elle a la
valeur numérique de 4, qui est le nombre de cette vertu génératrice d’où découlent
toutes les combinaisons, source de tout ce qui a reçu l’existence; et
c’est avec cette signification que ce nombre se retrouve au sommet de toutes
les Initiations, sous le Symbolisme sublime du Nom incommunicable, ou La
Parole perdue, le Nom ineffable de Dieu, que nous trouvons composé de quatre
lettres dans la plupart des langues anciennes et modernes :
En Hindou Rama En Scandinave : Odin
En Egyptien Amon En Grec : Θεος
En
Hebreu חוחי
En Latin Deus
En Chaldéen Baal En Français Dieu
En Syrien Adad
En Allemand Gott, etc., etc.
Pythagore le communiquait à
ses disciples sous le nom de TeTragrammaTon, ou TeTracTis, dont les
trois T forment le vénérable Emblème gnostique du Triple Tau, équivalant à
la lettre ש (Schin), le Triple Tau Hébreu, symbole kabbalistique de la
Divinité, ainsi qu’elle est manifestée par le Verbe, le Mot, le Nom ou le
Discours. Le Triple Tau entouré d’un Cercle, emblème de l’Eternité,est le
monogramme du Dieu Égyptien Thot, auquel est dédié notre Temple; et,
sous ce Cercle, il forme les initiales du plus grand Initiateur, du Père
de toutes les Sciences et de tous les Arts, Hermès Trismégiste, le premier qui
a proclamé le dogme de l’Immortalité de l’Âme, et qui
l’a symbolise par la Croix, emblème synonyme des deux
Colonnes, indiquant l’Union de l’Equilibre des Forces contraires qui
causent l’éternel Mouvement, l’éternelle Génération et l’éternelle Régénération,
en d’autres termes, l’Immortalité, représentée dans notre Chambre
Mystique par le Feu Sacré brillant sur l’Autel.
Nos anciens Frères, les Philosophes Hermétiques,
avaient la plus grande vénération pour la Croix, qu’ils regardaient comme le
Symbole des Quatre Éléments, représentés par les Animaux Apocalyptiques :
l’Aigle et l’Homme, le Taureau et le Lion, ou l’Air et l’Eau, la Terre
et le Feu, dont ils extrayaient la plus pure essence pour composer la Pierre
philosophale, figurée par notre Autel cubique. C’est pourquoi les Rose-Croix
disaient : « In Cruce Salus » — notre Salut est dans la Croix —
en
comparaison avec la rédemption de nos âmes par le sang du Nazaréen. La Croix
était aussi le symbole de la Lumière, LVX, car la Croix présente ces trois
lettres par le croisement de ses lignes. La Lumière chez les Kabbalistes, la
Pierre philosophale chez les Hermétistes, le Feu Central de la Nature chez les
Rose-Croix, la Pierre Cubique ou le Moellon Parfait chez les Francs-Maçons, ne
sont qu’une seule et même chose, équivalente au Terme médiateur réunissant
les opposés, à cette Arche sainte reposant sur les deux Colonnes et enseignant
à l’Adepte
comment tirer toute son énergie de la réconciliation des deux ennemis
apparents qui, pour lui, deviennent les piliers sur lesquels il établit sa
force. La parfaite compréhension de la Loi binaire te donnera cette connaissance
du Bien et du Mal que nos premiers Parents, poussés par la curiosité et la désobéissance,
ne réussirent pas a sauvegarder, méritant ainsi d’être chassés de l’Eden
pour leur indignité. Mais toi, mon Frère, tu t’es isolé sous le Masque de
la discrétion pour créer ta Personnalité par une longue période de méditation
silencieuse. Tu peux, sans crainte, te présenter devant le monde inconnu des
Lois mystérieuses de la nature; cependant, tiens-toi sur tes gardes, car,
déchaînées
contre ta volonté calme et puissante, qu’exalte la pleine compréhension de ta
liberté absolue, toutes les forces fatales combinées vont fondre sur toi d’
une manière sauvage...
Le Néophyte s’avance vers l’Autel, au centre de la Croix. Les quatre porte-bannières se placent eux-mêmes
aux angles de la Croix. Les deux Introducteurs placent le Manteau sur la tête et les épaules du
Candidat, le Philosophe Inconnu frappe deux coups dans ses mains; tous les Frères se lèvent.
...Apprends donc à t’entourer du mystérieux Manteau, insigne de l’Initiation
ou de la Connaissance réelle, ornement mystique de l’Adepte, contre lequel même
l’épée flamboyante du Chérubin serait sans pouvoir. Que la prudence ne
cesse jamais de te conseiller, ô mon digne Frère ; apprends à t’isoler
dans le calme d’une conscience dépouillée des vices et des superfluités
de la vie. Ce vêtement, qui dérobe à la vue des méchants et des profanes
l’Initié qui en connaît les usages multiples, doit toujours te couvrir de
ses plis protecteurs. De même que le Manteau d’Apollonius de Tyane, ce
Symbole représente la pleine et entière possession de soi-même; il figure
aussi, non seulement ce qui isole le Sage des courants instinctifs, mais encore
la Prudence et la Discrétion qui caractérisent le véritable Initié. Comme
le Voile d’Isis et le Manteau de Cybèle, que ton ornement sacré reste à
jamais fermé devant l’étranger... Le Manteau est peut-être le Symbole le
plus profond que l’Ordre ait mis devant tes yeux; l’étude de ce Symbole est
laissée aux soins de ton travail personnel et de ta persévérance. La lettre hébraique
représentant le Manteau est la dernière de l’Alphabet, ת (thau), qui
est le signe kabbalistique de la Vérité, de la Lumière, du Soleil, de l’Être
humain dans son état de perfection. Son nombre est 400
ou 5 x
8 x 10, ce qui signifie que c’est par les portes de la Mort
que la Volonté humaine monte vers la Pensée Divine. A ce moment suprême,
quand tu te trouves sur le seuil de l’immortalité, devant un monde que tu ne
connais pas, isolé sur le bord terrible d’un océan rugissant, où les
courants les plus effroyables se ruent les uns sur les autres et remplissent
l’atmosphère de bruits indescriptibles, cris jamais entendus auparavant,
lamentations à fendre
le coeur et clameurs à rendre
sourd, que la terreur ne te saisisse pas, mais regarde à l’Orient et
contemple la magnifique Étoile de l’Espérance, le Pentalphe, Symbole de la
domination de la Volonté humaine sur la Matière, signe de la Supériorité
et de l’Autocratie des Facultés intellectuelles sur les Mauvais Esprits ou
les Passions de l’Homme matériel. C’est l’Étoile des trois Sages de l’Évangile;
c’est le signe du Verbe fait chair; il représente l’Agneau béni de Saint
Jean ou le Bouc maudit de Mendès, Lucifer ou Vesper, Marie ou Lilith; bref,
il représente l’Homme, dans la toute-puissance de sa Volonté libre. Suivant
les Mystiques, dit Macrobe, ces cinq pointes représentent le Dieu Suprême ou
Premier Moteur. l’Intelligence ou les Hommes nés de Lui, l’âme du Monde,
les Sphères célestes et les Choses terrestres. Il est appelé en Kabbale le
Signe du Microcosme, Signe dont Goethe exalte la puissance dans le sublime
monologue de Faust : « Ah ! comme cette vue excite mes sens le sens cette
jeune et sainte volupté de la vie bouillir dans mes nerfs et dans mes veines.
Était-il un Dieu, celui qui a tracé ce signe calmant l’étourdissement de
mon âme, remplissant mon pauvre coeur de joie, et, dans un tressaillement mystérieux,
dévoilant autour de moi les forces de la Nature ? Suis-je Dieu ? Tout me
devient si clair. Je vois, dans ces simples lignes, la Nature active se dévoilant
devant mon âme. Maintenant, pour la première fois, je comprends la vérité
des mots du Sage : « Le monde des esprits n’est pas fermé... Tes sens sont
obtus, ton coeur est mort... Lève-toi !... Baigne ta poitrine, encore enveloppée
d’un Voile Terrestre, dans les splendeurs du jour naissant, ô Adepte de la
science Divine ! »
Consécration
Au nom de Notre Vénérable Maître, le Philosophe Inconnu, et par les
pouvoirs qui m’ont été conférés par le Suprême Conseil de l’Ordre
Martiniste, je te confère le titre d’Initié, Apprenti Cohen, Maçon du
Secret. Je te présente le Diplôme auquel tu as droit et, en même temps, ton
nom mystique et ton numéro — car, nouvellement initié à
nos
mystères, ta personnalité disparaît, absorbée dans celle de l’Initiateur,
au moins jusqu’à ce que, par une persévérante et patiente méditation, tu
aies prouvé que tu comprends pleinement la profondeur et la sublimité de la
Philosophie que nous professons, — jusqu’à ce que tu te sois bien montré qualifié
pour briser tes liens et pour assurer, enfin, ta pleine indépendance
intellectuelle par la complète autocréation de ta personnalité. Alors, seul
Maître de toi-même, tes rapports d’instruction cesseront avec tous les
Martinistes quels qu’ils soient, et tu assumeras la responsabilité de tes
connaissances devant ta conscience et devant Dieu. Le Signe de ce Degré est ...;
il
fait allusion à l’Étoile à 5 pointes ou flamboyante. Le Mot Sacré est ...
et est
donné en trois temps. Et maintenant, mon Frère, je te présente ma main
droite, et avec elle, l’étreinte du Martiniste. Lève-toi, et accompagne-moi
à l’Orient,
où tu seras placé à ma droite.
Pendant la consécration, le Néophyte est agenouillé à l’Autel. Les quatre chérubins
forment une Croix avec leurs épées flamboyantes au-dessus de la tête du Néophyte. Le Philosophe Inconnu conduit ensuite le
nouvel Initié au Trône. Les quatre porte-bannières se placent à droite et à gauche du Trône. Le Frère Inconnu s’avance an pied
de la Croix, sous l’Arche. Les voiles du Temple sont tirés.
Le
PHILOSOPHE INCONNU : Frères, le Temple de la Vérité abrite un Élu de plus.
Gloire à Dieu ! Entourons l’Autel Sacré et chantons l’Hymne
triomphal « Sacré, Sacré, Sacré, Seigneur Sabaoth ! le Ciel et la Terre sont
remplis de ta Sainte Gloire ! »
Fermeture
Le
PHILOSOPHE INCONNU frappe deux petits coups lentement.
Le
FRÈRE INCONNU fait de même.
L’orgue joue une marche religieuse. Les Frères, sur deux rangs, forment
une procession, précédés des Maîtres de Cérémonies. Les Officiers — excepté le Philosophe Inconnu et le Frère Inconnu — ferment la procession. Tous tournent autour de l’Autel
deux fois.
Après être passée deux fois autour de l’Autel, la procession se
divise en deux. Les Membres tournent une troisième fois, pendant que les
Officiers se séparent (devant le Frère Inconnu à l’Ouest) en deux rangs simples, droite et gauche.
Les Membres procèdent de la même manière. Quand tous entourent l’Autel, le
Frère Inconnu s’avance au pied
de la Croix. Les Porte-bannières se placent aux quatre bras de la Croix.
Lorsque tous ont pris place, et que le
Philosophe Inconnu, accompagné du nouvel Initié, descend du Trône pour
venir an milieu des Frères, le choeur mystique, caché derrière le voile de
l’Orient, commence l’Hymne triomphal ou Benedictus :
— Béni soit celui qui vient an nom du Maître. Hosannah dans le pins haut
des Cieux !
Pendant l’Hymne, le nouveau Frère jette de l’encens sur le Feu Sacré,
et les assistants lèvent deux fois les bras vers le ciel en disant à voix
basse : ...
Le
PHILOSOPHE INCONNU, embrassant le Néophyte, lui dit à l’oreille :
« T. s. l. s. e. m. d. d. d. m... »
Le
PHILOSOPHE INCONNU : Unis en corps, soyons unis en âme et en esprit,
maintenant et toujours.
TOUS : Amen.
Les Frères quittent le Temple dans l’ordre suivant Bannière de l’Homme,
Premier et Second Maîtres des Cérémonies, Frère Inconnu, Frère Initié et
Frère Associé, Bannières du Lion et du Taureau, Premier et Second
Surveillants, Premier et Second Introducteurs, Archiviste et trésorier, Secrétaire
et Maître des Sceaux, Orateur et Expert, Philosophe Inconnu et Néophyte, Bannière
de l’Aigle.